De nombreux experts réputés dans le monde se sont réunis à San Francisco pour débattre des conséquences du changement climatique sur la santé. Cela dans le cadre du Forum mondial climat et santé. L’appel à l’action lancé est clair : « Le changement climatique est une urgence sanitaire mondiale ».
L’Organisation mondiale de la santé considère que le changement climatique est la « plus grande menace pour la santé mondiale au 21e siècle ». Mais l’appel à l’action souligne que bon nombre des politiques qui nous dirigent vers nos objectifs climatiques ont des avantages démontrables et significatifs pour la santé.
C’est une bonne nouvelle. Malheureusement, nous ne parvenons pas à capitaliser sur les opportunités sanitaires de l’action climatique.
Un pipeline fédéral a besoin d’une évaluation indépendante
Le gouvernement canadien a engagé 35 millions de dollars pour soutenir la santé socio-économique. Il aide les travailleurs des communautés houillères à la transition vers des emplois dans une économie à faibles émissions de carbone.
Dans le même temps, il a engagé des milliards de dollars pour l’achat d’un pipeline de bitume dilué hautement inflammable, sans évaluer de manière adéquate ses impacts sur la santé locale et mondiale. Le pipeline va des sables bitumineux de l’Alberta à la côte du Pacifique.
Pourtant, selon les leaders mondiaux de la santé, un pipeline fédéral a besoin d’une évaluation indépendante.
Nos gouvernements doivent investir dans des solutions et non dans les causes du changement climatique. Ceci est essentiel, comme indiqué clairement dans le rapport spécial des Nations Unies sur le réchauffement de la planète à 1,5 °C, publié ce mois-ci.
Les dirigeants du secteur de la santé participant au forum sur le climat ont également écrit une lettre ouverte au premier ministre Justin Trudeau. Celle-ci fait appel à une évaluation sanitaire indépendante du nouvel agrandissement du pipeline Trans Mountain. Il a été signé par plus de 200 médecins, infirmières et professionnels de la santé du Canada et du monde entier.
Un processus défectueux de l’ONE
La lettre souligne que le processus de l’Office national de l’énergie (ONE) était défectueux. Ce qui entraîne une évaluation inadéquate de l’impact sur la santé.
Elle réprouve le choix du Canada de construire une nouvelle infrastructure de grande envergure utilisant des combustibles fossiles pour réduire les émissions de dioxyde de carbone. Ses impacts sur la santé humaine dans le monde sont très grands. Les décès et les maladies dus à la chaleur, les tempêtes, les incendies de forêt, les inondations, les pénuries alimentaires, les migrations forcées et les conflits connexes font partie des impacts les plus graves observés.
Dans son évaluation, l’ONE n’a envisagé qu’un scénario de déversement d’hydrocarbures loin des centres de population, malgré les aléas d’une multiplication par sept du nombre de pétroliers traversant le port animé de Vancouver. La lettre appelle à une étude des effets sur la santé d’un déversement grave dans cette région métropolitaine.
Les risques potentiels pour la santé liés au benzène, un puissant agent cancérigène responsable de la leucémie chez les enfants, n’ont pas suffisamment été pris en compte également.
A noter que l’évaluation de l’impact du projet sur la crise sanitaire mondiale du changement climatique était absente. Ni le processus de révision de l’Office, jugé inadéquat dans une décision de la Cour d’appel fédérale, ni le Comité ministériel sur l’expansion de Trans Mountain, n’ont pris en compte les effets à long terme, locaux et mondiaux sur la santé, des émissions de gaz à effet de serre.
Une consultation des communautés autochtones
Les impacts sur la santé des populations autochtones doivent également être spécifiquement pris en compte. A savoir que ce sont souvent les plus touchées par la contamination de l’environnement en raison de leurs liens étroits avec la terre. La décision de la cour a noté que la consultation des communautés autochtones était insuffisante.
Selon les meilleures sources, la trajectoire actuelle des émissions mondiales pourrait entraîner un réchauffement de 2,6 à 4,8 °C en 2100, ce qui est bien au-dessus de l’objectif de 1,5° C que le Canada s’est fixé pour l’accord sur le climat de Paris.
Toute évaluation des risques des projets d’énergie fossile doit prendre en compte les impacts cumulatifs sur la santé.
Cependant, le gouvernement du Canada est maintenant le propriétaire du pipeline, en plus d’être clairement en conflit d’intérêts lorsqu’il s’agit de juger des impacts négatifs du projet. Le gouvernement semble concentré sur la protection de son investissement de plusieurs milliards de dollars. Pour cette raison, l’évaluation des impacts sur la santé liée au pipeline doit être totalement indépendante.